L'Assistance publique-hôpitaux de Paris (AP-HP) et les sociétés Lifen, Implicity, Nouveal, Withings et Nabla, s'allient autour du projet "@HôtelDieu", "pour accélérer l'adoption des innovations numériques et en intelligence artificielle (IA) dans l'écosystème hospitalier", ont dévoilé les partenaires le 16 juin à TICsanté, à l'occasion du salon Vivatech.
Ce projet est porté par "une alliance d'acteurs complémentaires" composée des entreprises Implicity, Lifen, Nabla, Nouveal, Withing, de l'incubateur Biolabs, de l'Université de Paris et l'AP-HP, avec sa plateforme d'accompagnement des projets numériques en santé.
Le consortium s'est formé au "début avril", lorsqu'ensemble, les partenaires ont répondu à l'appel à manifestation d'intérêt (AMI) "Santé numérique", lancé par la Banque publique d'investissements Bpifrance.
L'AMI "Santé numérique" vise à favoriser l'émergence en France de solutions innovantes "armées de propositions de valeurs médico-économiques pour conquérir le marché de l'e-santé", rappelle Bpifrance sur son site.
"Ce projet est une réponse à cet AMI, nous sommes dans une phase de candidature, à ce stade il a été présélectionné et nous y croyons, c'est la raison pour laquelle nous le présentons ici collectivement", a expliqué Nicolas Castoldi, directeur délégué de l'AP-HP, chargé de la conduite de projets transversaux, notamment le nouvel Hôtel-Dieu.
"C'est le moment de partager ce qu'englobe ce projet et plus largement, de présenter une manière différente de travailler entre l'hôpital et les start-up et comment nous pouvons construire des projets ensemble."
Les projets lauréats de l'AMI doivent, eux, être dévoilés "mi-juillet", a indiqué le directeur général délégué de l'AP-HP et "idéalement", les membres du consortium espèrent lancer opérationnellement leur projet "à la rentrée, après l'été".
Le nom du projet, "@HôtelDieu", reflète "le symbole de l'hôpital parisien, qui est l'Hôtel-Dieu, à l'ombre de Notre-Dame".
Pour rappel, le projet de rénovation de l'Hôtel-Dieu inscrit déjà le numérique dans ses travaux. Confiée à Novaxia, la rénovation implique un incubateur "biotech/medtech" géré par Biolabs et un espace de coworking dédié à l'IA en santé, qui a vocation à accueillir "une cinquantaine de start-up" spécialisées.
"Cet incubateur Biolabs sera une porte d'entrée vers l'ensemble des services de soins de l'AP-HP, pas seulement à l'hôpital de l'Hôtel-Dieu. L'idée est de créer une porte d'entrée pour les collaborations entre les start-up et l'AP-HP sur les questions de télésurveillance et d'objets connectés autour de ce noyau dur", a détaillé Nicolas Castoldi.
"La dynamique du projet est née collectivement, elle n'est pas exclusive mais elle suppose un engagement individuel très fort des dirigeants des entreprises. Ce groupe de pionniers a vocation à ouvrir la voie et nous avons la volonté d'élargir ce cercle et pour nous, à l'AP-HP, cela permettra de mieux travailler avec les start-up", a-t-il complété.
"Pour que la santé numérique devienne une réalité, nous avons besoin de faire émerger des acteurs qui, demain, fassent référence et permettent à d'autres de naître."
Un point de vue partagé par Arnaud Rosier, directeur général de la start-up Implicity, qui développe une plateforme pour la télésurveillance des patients porteurs de prothèses rythmiques implantables et des algorithmes d'IA. "Il y a très peu de vraie concurrence entre les start-up de santé en France, elles sont très complémentaires et le problème est qu'elles ne couvrent pas toute la chaîne de valeur, qui est d'autant plus compliquée en santé", a-t-il souligné.
"Si nous prétendons vraiment à être des éclaireurs, nous devons construire sur des succès, creuser le sillon pour les autres et contribuer concrètement à la transformation de l'hôpital et de ses métiers", a-t-il complété.
Le projet "@HotelDieu" remonte "à 2017", a expliqué le Pr Philippe Ravaud, directeur du centre d'épidémiologie clinique de l'Hôtel-Dieu et responsable scientifique du projet de rénovation.
"Au départ, il y avait le projet d'un institut hospitalo-universitaire (IHU) avec une plateforme et le suivi à distance des patients et d'abord des malades chroniques. L'année dernière, le Covid-19 nous a offert des cas d'usage à grande échelle et, par exemple, Covidom a été la preuve de concept que cela fonctionne: nous pouvons soigner à distance et aussi bien", a-t-il détaillé.
Pour le Pr Ravaud, il s'agit de "faire naître l'hôpital numérique", pour répondre au besoin de suivi des malades chroniques mais aussi pour les femmes enceintes ou les patients sortant des urgences et nécessitant un suivi en ambulatoire, etc. Le consortium ne "vise pas un nombre précis de patients à inclure" mais entend, via la multiplication des "hôpitaux numériques", suivre "des dizaines de milliers de patients".
"Il y a deux piliers dans le projet: travailler avec le noyau dur composant le consortium actuellement, puis structurer à l'Hôtel-Dieu une plateforme d'innovation ouverte, d'animation et d'accompagnement pour les start-up qui le souhaiteront", a fait savoir Nicolas Castoldi.
Questions réglementaires, médico-économiques, méthodologiques, d'évaluation, etc., cette plateforme doit permettre de couvrir l'ensemble des problématiques auxquelles sont confrontées les start-up qui interviennent sur le champ de la santé.
A l'instar du projet "@HôtelDieu", la plateforme devrait voir le jour "à la rentrée", si l'AMI les récompense.
En attendant que Bpifrance sélectionne ses projets lauréats, chaque société engagée dans le consortium tient son rôle et avec l'AP-HP, l'université de Paris et Biolabs, entend faire émerger son projet "même si cela prendra plus de temps".
Ainsi, Lifen, spécialisée dans l'échange sécurisé de documents médicaux, se concentre sur le volet "interopérabilité" des données "entre les start-up et l'hôpital et entre les start-up entre elles", a expliqué son directeur général, Franck Le Ouay.
Pour rappel, Lifen a lancé au début de l'année son programme "Soigner ensemble" qui doit faciliter l'accès des établissements de santé aux solutions d'e-santé, "tout en les rendant interopérables avec leurs outils actuels". Sa participation au consortium s'inscrit dans cette démarche.
Outre son expertise en matière de télésurveillance, Implicity se concentre sur "les outils servant à présenter les données aux professionnels de santé et le développement d'algorithmes d'IA" pour mieux comprendre les parcours des patients.
Spécialiste, Withings fournira les objets connectés aux patients pour assurer leur suivi à domicile et collectera, traitera et analysera les données issues de ces dispositifs médicaux pour "créer des biomarqueurs", a expliqué Vincent Vercamer, responsable de la stratégie de Withings.
Nouveal, spécialiste de la digitalisation du parcours patient, planche sur une "plateforme générique pour le pont entre tous les protocoles spécialisés et pour présenter une vue globale aux soignants". Cette plateforme servira également au télésuivi des patients et à l'envoi d'alertes, quand nécessaire.
Et enfin, Nabla, start-up spécialisée dans la santé de la femme, va développer une application de télésuivi en sortie d'urgences gynécologiques, a-t-on appris le 16 juin.
Concernant le financement du projet, les partenaires n'ont communiqué aucun élément chiffré, espérant toutefois que Bpifrance puisse les accompagner dans le cadre de l'AMI.